Le 16 avril 2020
Mes très chers parents,
C’est officiel, nous n’avons plus de porte dans nos toilettes. Pour une durée indéterminée. Le temps que nous fassions les travaux, nous allons donc vivre comme un vieux couple décomplexé de l’intimité. Le rêve.
Dans le salon, ou plutôt la forêt vierge, les plants de tomates explosent. Pas au sens premier du terme (le temps de la sauce ketchup n’est pas encore venu), mais ils affichent fièrement un bon 30-40 cm de haut pour certains. Les plus précoces commencent même à arborer leurs premières fleurs. Et tout cela, sans engrais ! Je ne sais vraiment pas pourquoi certains professionnels pleurent pour pouvoir conserver leurs habitudes pétrochimiques.
Certains de leurs copains (aux plants) sont déjà sous serre et tentent de s’adapter. Plus ou moins avec succès selon les caractères. En tout cas, j’ai hâte que les premières tomates montrent le bout de leur nez afin que je puisse leur montrer mon derrière pour les faire rougir. Je ne sais pas si cela fonctionnera mais comme papa le fait chaque année*, je vais essayer à mon tour. Quand j’ai vu les photos de certaines de vos (énormes) tomates l’année dernière, je me demande d’ailleurs s’il ne montre que son arrière-train.
Hier, je me suis installée sous le pommier en fleurs afin de lire un peu, mais le bourdonnement de toutes les abeilles a fini par m’endormir. Un conseil, si vous avez des problèmes d’insomnie, installez une ruche au-dessus de votre lit, vous allez régler le problème à coup sûr.
Je viens de me rendre compte qu’une espèce de moquette envahissait mes jambes. Je n’ai pourtant pas pris d’abonnement à la planète des singes. J’ai bien peur que mon petit rasoir ne suffise pas à éradiquer le conquérant. Est-ce donc lui qui me chatouille les mollets lors de mes footing supersoniques ?
Allez, je vous embrasse et m’en vais me jeter à corps perdu dans les sauges. J’ai entendu dire que ces merveilleuses plantes ralentissaient la pousse des poils.
Votre fille au naturel.
* Oups, désolée. J’oubliais que vous n’êtes pas les seuls à lire mes lettres (je crois qu’on nous observe).