Mes très chers parents #9

Le 16 avril 2020

Mes très chers parents,

C’est officiel, nous n’avons plus de porte dans nos toilettes. Pour une durée indéterminée. Le temps que nous fassions les travaux, nous allons donc vivre comme un vieux couple décomplexé de l’intimité. Le rêve.

Dans le salon, ou plutôt la forêt vierge, les plants de tomates explosent. Pas au sens premier du terme (le temps de la sauce ketchup n’est pas encore venu), mais ils affichent fièrement un bon 30-40 cm de haut pour certains. Les plus précoces commencent même à arborer leurs premières fleurs. Et tout cela, sans engrais ! Je ne sais vraiment pas pourquoi certains professionnels pleurent pour pouvoir conserver leurs habitudes pétrochimiques.
Certains de leurs copains (aux plants) sont déjà sous serre et tentent de s’adapter. Plus ou moins avec succès selon les caractères. En tout cas, j’ai hâte que les premières tomates montrent le bout de leur nez afin que je puisse leur montrer mon derrière pour les faire rougir. Je ne sais pas si cela fonctionnera mais comme papa le fait chaque année*, je vais essayer à mon tour. Quand j’ai vu les photos de certaines de vos (énormes) tomates l’année dernière, je me demande d’ailleurs s’il ne montre que son arrière-train.

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Mes très chers parents #8

Le 13 avril 2020

Mes très chers parents,

Hier, j’ai fait des cookies aux flocons d’avoine et au chocolat ainsi que mon cinquantième pain cocotte. Il y a deux jours, j’avais fait un cake aux pépites de chocolat. Paix à son âme. Je sais, ça fait beaucoup de chocolat, mais je crois que nous sommes dans la période de Pâques donc tous les vices sont permis (enfin, au moins celui-là). Toujours est-il que si j’avais les cheveux roux, on pourrait me confondre avec Bree Van de Kamp.

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Mes très chers parents #7

Le 12 avril 2020

Mes très chers parents,

Ce matin, j’ai été réveillée par un bruit de meuleuse. Il provenait des toilettes du rez-de-chaussée. Oui je sais c’est bizarre. Mais je crois que David est en train de refaire toute la baraque. À la fin du confinement, on va habiter un palace. Enfin, un palace refait avec les moyens du bord. Du coup, on va vivre dans une ambiance cabane de plage, sans la plage. C’est un style.

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Mes très chers parents #6

Le 10 avril 2020

Mes très chers parents,

Aujourd’hui, David a rencontré Ratatouille dans le jardin. Il lui a demandé à plusieurs reprises s’il pouvait lui filer la recette du plat du même nom mais tu parles, il est pire que les grands-mères ! Il n’a lâché AUCUNE info, l’égoïste ! Le pire, c’est qu’il a osé se servir dans les graines des poules SANS demander la moindre permission à ces dames. Honnêtement, on est déçus, en vrai il est carrément imbuvable. C’est souvent comme ça avec les stars. OK, il a une tête sacrément mignonne mais dans la vie, ça ne fait pas tout ! Enfin, j’irai lui en toucher deux mots demain, il va moins rigoler Toutouille.

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Mes très chers parents #5

Le 29/03/2020

Mes très chers parents,

J’étais tranquillement vautrée dans le canapé et Jaïa endormie dans son panier, quand soudain, elle s’est mise à gémir d’une étrange façon. Je crois bien qu’elle rêvait du Berger allemand d’un voisin qu’elle n’a pas vu depuis quinze jours. Comment je le sais ? Croyez-moi, il ne vaut mieux pas que je rentre dans les détails. Tout ce que je peux dire, c’est qu’Ina s’est redressée d’un coup, a scruté sa copine d’un drôle d’air, m’a regardée, puis s’est léchée l’arrière-train avant de se laisser retomber sur le carrelage. Pour vous, ça ne révèle peut-être pas grand-chose, mais pour moi ça veut dire beaucoup.

Avec David, nous avons remis les pendules à l’heure, et ça ne veut pas dire qu’on s’est disputés.

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Mes très chers parents #4

Le 28/03/2020

Mes très chers parents,

J’ai attaqué le dixième roman du mois de mars. Je crois que je commence à ne plus distinguer le jour de la nuit. Je me réveille à 4 heures du matin, les billes grandes ouvertes et les cheveux en vrac. Alors je lis vingt pages de mon livre en cours, ou plus si je suis en forme, puis je finis par me rendormir comme une belette. À moins que ce soit un loir.

En attendant, j’ai peur que les Démons de minuit finissent par s’installer dans ma chambre et m’empêchent de dormir du sommeil du brave. À moins que ce soit du juste. Tout ça, je suis sûre que c’est la faute à Émile et Images. Désormais, ils m’entraînent au bout de la nuit et j’en ai ras le bol de me taper leur karaoké pendant des heures. Alors, pour chasser ces Vilains, j’éteins et je rallume ma lampe de chevet avec frénésie. Du coup, je sursaute car les dents de Jacquouille m’apparaissent en flashback, lui qui adorait jouer avec les interrupteurs. Quelle Fripouille celui-là !

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Mes très chers parents #3

Le 27/03/2020

Mes très chers parents,

Vous pouvez fluoter cette date dans votre calendrier puisqu’aujourd’hui, j’ai fait mon deuxième footing, soit le quatrième de ma vie tout entière (en tant que femme consentante). Je vous imagine déjà me balancer des cotillons en scandant mon prénom, et c’est beau.

Avec 10 tours de plus qu’il y a deux jours, je sens que je deviens une athlète (le haut niveau sera pour le troisième footing). En plus, je n’ai même pas de courbatures, ce qui prouve que finalement j’étais faite pour tourner en rond dans mon jardin. J’ai enfin trouvé ma vocation et ça me donne envie de chialer.

Jaïa a pris la mauvaise habitude de se poster en travers de mon chemin, sans bouger. Je crois que je vais bientôt passer au saut d’obstacles.

Célimène a passé cinq tours sans bouger, me scrutant à travers le grillage à poules à chaque passage. Je crois qu’elle est admirative.

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Mes très chers parents #2

Le 26/03/2020

Mes très chers parents,

Aujourd’hui, j’ai dû aller faire les courses car cela faisait plus d’une semaine que je n’y étais pas allée. Hier soir, je me suis surprise à sucer une barrette de chocolat pâtissier car je n’avais plus que ça dans mes placards et qu’il fallait absolument que j’assouvisse ce manque (question de vie ou de dépression). Autant vous dire qu’il était temps de se ravitailler !

J’ai donc imprimé la nouvelle attestation de déplacement afin de pouvoir sortir de prison chez moi et comme je ne sais plus comment je vis, j’ai eu un gros doute lorsque j’ai dû y apposer la date manuscrite. Je me suis mise à trembler, ayant eu peur de me tromper et donc qu’on me jette en prison (la vraie) si lors d’un contrôle, il s’avérait que j’avais écrit la date d’hier.
« Périmée ! Au cachot ! »
Déjà que je transpire à grosses gouttes dès qu’un gendarme ou un policier m’interpelle (ce qui, je dois l’avouer, arrive très rarement puisque j’ai un comportement exemplaire). Si en plus, j’avais dû payer 135 € d’amende et renoncer à mon ravitaillement chocolaté (entre autre), je me serai carrément évanouie, soit par avarice soit par hypoglycémie.

Mais j’ai tout rempli comme il faut et j’ai pu me mettre en route. J’ai failli me perdre tellement ça faisait longtemps que je n’avais pas fait le trajet. En plus, mes yeux piquaient, ils n’étaient plus habitués à autant de paysages. Lire la suite

Mes très chers parents #1

Le 25/03/2020

Mes très chers parents,

Comme Virginie Grimaldi écrit à sa mamie, je me suis dit que j’allais faire pareil avec vous, puisqu’il m’est arrivée quelque chose d’exceptionnel aujourd’hui. David, l’homme qui partage ma vie (paix à son âme), pourra en témoigner.

Au moment où j’écris, j’agonise dans mon canapé en regardant Megan Markle accepter une demande en mariage sur fond de feux d’artifice sur la 1. En plus de perdre quelques neurones, j’ai la trachée qui me brûle, les joues rouges et l’œil vide. J’ai également la jambe qui flageole. Pourquoi ?

Parce que j’ai couru ! (oui, vous avez bien lu). J’ai fait 30 fois le tour du jardin. 15 en courant et 15 en marchant (si j’avais fait 30 tours en courant, je vous écrirais depuis l’hôpital). Je crois bien que ça fait 25 ans que mes jambes n’avaient pas connu ça. Je suis restée là où c’est plat et j’ai tout de même frôlé la crise cardiaque. 1 tour = 73 pas, et 30 x 73 = grosso modo 2200 pas. Amen. Lire la suite

Huit ans de toi

Si avant toi on m’avait décrit ton visage, je n’aurai pas hésité une seconde à me lancer dans la grande aventure. J’aurai tout enduré pour te rencontrer enfin. J’aurai laissé mon corps gonfler, me filer la nausée, je t’aurai laissé m’envahir et me remplir d’amour.

Si avant toi on m’avait expliqué la sensation d’être mère pour la première fois, j’aurai désiré profondément la ressentir à mon tour. J’aurai tout fait pour que ça marche, pour que mon esprit s’envole dans les nuages à la recherche de tes traits, de tes sourires, de ce mot qui fera toi et que l’on prononcera pour que tu nous rejoignes, pour t’avertir d’un danger, pour t’engueuler et pour t’aimer.

Si avant toi on m’avait prévenue de tout ce qu’il se passerait, j’aurai tout arrêté. J’aurai eu peur, j’aurai pleuré, j’aurai crié, je n’aurai pas voulu le vivre. Je n’aurai pas voulu du désespoir, des ténèbres, de la profondeur des sentiments noirs qui s’incrustent jusque dans le moindre petit lopin de chair. Je n’aurai pas osé te voir si belle mais si fragile, si immobile dans ce moment qui se devait tellement exceptionnel. Je n’aurai pas voulu t’aimer, pas comme ça.  Lire la suite