Juste avant le bonheur (Surprise inside)

« Il est venu au monde et je l’ai perdu avant même de le rencontrer, s’est lamentée cette femme.
Je n’ai pas su lui répondre, à cette époque, ce que j’ai découvert depuis et que je sais aujourd’hui.
Que certains bébés, certains enfants se « donnent la liberté » d’apparaître, de seulement apparaître dans la vie, pour insuffler l’envie à l’un de leurs parents de naître enfin ou d’accéder à plus de vie dans leur existence.
Certains enfants sont de passage pour montrer à l’un ou à l’autre de leurs géniteurs un chemin, pour témoigner d’un choix de vie à faire.
Certains enfants, par leur mort subite, invitent leurs parents à oser un changement qu’ils n’avaient pu envisager jusqu’alors.
Certains enfants ont ce pouvoir de dire par leur présence furtive et fugitive et leur disparition brutale : « Ose ta vie, toi seul la vivra ».
Nous pouvons ainsi écouter et entendre le message secret envoyé par ces enfants
dont la présence éphémère nous blesse à jamais si nous restons sourds à leur message d’espoir. »
Jacques Salomé

Je ne pourrai le dire de meilleure façon que celle de Jacques Salomé.
Peut-être que cela peut te paraître étonnant, voir ahurissant, et pourtant.

Perdre un enfant, en voilà une grande injustice, une terrible douleur, la pire même. Comment concevoir de rire ni même de sourire après ça ? Comment se l’autoriser ? Est-ce déplacé, est-ce une trahison ?
Non, perdre un enfant, c’est la naissance d’un immense chagrin, mais ce n’est pas le garder pour toute la vie. Perdre un enfant, c’est acquérir une autre vision de la vie, enveloppé(e) dans la force qu’il nous a légué.

Après le brouillard vient l’éclaircie, toujours. Même si la brume a du mal à se dissiper, les rayons du soleil finissent toujours par la percer, un à un.

L’enfant est parti, mais il laisse beaucoup de lui. Il délivre un message, et les parents endeuillés ne le découvriront que plus tard, quand ils seront prêts. Cela peut prendre plus ou moins longtemps selon les personnes, car il faut réussir à s’ouvrir de nouveau. Ce n’est pas chose facile, que de passer outre le chagrin. Cela prend des semaines, des mois, des années.

Quand j’ai perdu ma fille, tout était noir. Je suis restée entre quatre murs, j’avais besoin de rester enfermée avec ma tristesse. Elle et moi, on a passé beaucoup de temps ensemble. Je ne voulais personne d’autre qu’elle. J’ai eu du mal à laisser le soleil me réchauffer à nouveau le visage et le cœur. Mais cela me faisait du bien. Mon chagrin me délivrait peu à peu, mes larmes vidaient mon corps endolori, le goût du sel dans ma bouche laissait peu à peu la place au recul. Celui-là même qui te sauve, le héros.

Un jour, tu ouvres les yeux en même temps que ton esprit. Tout se reconnecte, après la longue préparation qu’endosse le rôle de la peine. Non pas que tu n’en éprouveras plus, mais tu réussis à commencer à comprendre le message. A ce moment là, la vie reprend ses droits, et toi tu t’aperçois que pour ton enfant, tu vas devoir être fort(e), et tu en as l’envie, pour lui. Tu sais qu’il te manquera toute ta vie, et que rire à nouveau ne signifiera pas l’oublier pour autant. Tu le sais, tu le sens, il n’est plus là mais il est partout où tu es, il t’accompagnera toujours et tu pourras compter sur lui pour te guider.

Perdre un enfant, c’est perdre une partie de ton cœur pour permettre à l’autre moitié de te guider vers une vie plus en accord avec toi-même.

Quand ma fille est partie, quand elle m’a délivré son message, j’ai pris conscience que je devais me ressaisir et ne plus continuer à m’embourber dans un métier qui ne me correspondait pas, ou plus. J’étais triste et mal, je ne vivais pas la vie que j’aurai aimée. Alors je suis partie, j’ai collé le timbre sur l’enveloppe de la démission, j’ai fait mes cartons et j’ai changé de département. Et j’ai commencé à respirer de nouveau, j’ai repris goût à mes envies, à ce que j’ai toujours aimé faire depuis petite. Je savais que je devais me concentrer sur l’artistique, sur le travail des mains et de l’esprit, sur toutes ces choses qui me faisaient vibrer et me redonnaient le sourire. Alors je me suis laissée guider.
Un jour, mon homme et moi sommes passés dans ce rayon, celui où l’étiquette de cette machine à coudre affichait un rabais. Je devais passer par là, et cette dame devait s’arrêter pour la regarder elle aussi, afin que je ne réfléchisse pas trop, pour que je me décide à me jeter sur cet unique exemplaire, cette belle affaire qui allait changer ma vie.

J’ai cousu mon premier doudou, mon homme a cousu son premier doudou. Un mouton pour moi, un crocodile pour lui. Deux jolis doudous pour un seul ange, deux créations d’amour que nous allions garder toute notre vie. Deux petits animaux de tissu qui peut-être, un jour, seront légués à l’enfant d’après. Le nouveau départ.

Ma fille me guide toujours, elle me montre qu’elle est ici, tout près de moi, je sais reconnaître ses signes à présent.

Je me demanderai toujours ce que je serais devenue sans elle, je la remercie jour après jour pour tout ce qu’elle m’a apportée.

J’ai créé mon entreprise de créations textiles, je confectionne beaucoup pour les enfants mais aussi pour leurs mamans. J’ai perdu mon bébé, mais je poursuis mon chemin de mère à travers tous ces tissus et toutes ces matières qui prennent forme sous mes doigts. J’accumule toutes les couleurs dans mon atelier, j’amène la joie et le bonheur dans ma vie. Du moins, je fais tout pour. J’essaie de ne pas louper les occasions qui s’offrent à moi, pour être plus heureuse. Et quand la vie ne nous gâte pas, quand elle s’acharne même parfois, je me dis que c’est pour une raison, car finalement, il s’avère qu’il y en a toujours une. S’il on sait l’écouter.

Juste avant le bonheur, il y avait une vie triste et fade, je le sais aujourd’hui.

Pour Agnès Ledig, je crois qu’il y a eu l’écriture, juste après le malheur. J’ai refermé son petit livre hier. Je sais que nous avons ce point commun, nous, les mamans endeuillées. Je sais qu’après le désespoir vient la vie, la vraie, ou tout au moins une seconde vie bien différente de la première. Et elle le raconte dans son livre, elle met le doigt sur ce basculement de la vie, sur le message que délivrent ces enfants perdus bien trop tôt. Peut-être de manière exagérée oui, certainement même (certains lecteurs diront que ce n’est pas toujours crédible), mais je pense que c’est une façon d’intégrer plus facilement que le malheur ne dure pas, qu’il se passe de jolies choses ensuite. Que l’on peut parler de bonheur, même après le Drame. Biensûr, la vie ne sera pas toujours rose, contrairement à ce que son livre veut bien nous faire penser – puisqu’il est résolument tourné vers le bonheur finalement -, mais il faut garder en tête que tout arrive pour une raison, que le destin nous guide autant que nos petits anges le font. Il faut se rendre compte que ce n’est pas parce que nous ne les voyons pas qu’ils ne sont plus présents.

Ils ont cette force de nous pousser plus loin, plus fort, plus vite.

Au commencement de la lecture, je me disais que l’écriture et les personnages étaient assez simples et lisses, et puis au fur et à mesure de l’avancée dans l’histoire, les larmes montaient, à plusieurs reprises, mais l’espoir rejaillissaient toujours. Je pense qu’Agnès Ledig a choisi d’en faire un peu trop pour mettre l’accent sur le bonheur, le malheur étant déjà bien assez présent et évident. Elle a voulu de toutes ses forces que l’on garde à l’esprit que perdre un enfant c’est souvent gagner une vie, la nôtre. Peut-être que ce que j’écris peut choquer et paraître inconcevable. Quand on ne l’a pas vécu, on ne voit pas les choses de la même façon. Quand on est encore embourbé dans la tristesse aussi. Biensûr perdre un enfant reste la chose la plus terrible qu’il soit, je suis bien placée pour le savoir, mais quand on l’a perdu, il faut continuer à avancer, et tout faire pour être heureux. Et cela finit par arriver. Ce bonheur, c’est grâce à ces tout-petits qui ont donnés leur vie pour que leurs parents se tournent réellement vers la leur.

Mais ils restent présents, dans le souffle du vent, dans l’étoile qui scintille, dans le battement d’ailes du papillon, partout.

« Tu n’es plus là où tu étais, mais tu es partout là où je suis. »
Victor Hugo

Juste avant le bonheur

Cela fait longtemps que Julie ne croit plus aux contes de fées. Caissière dans un supermarché, elle élève seule son petit Lulu, unique rayon de soleil d’une vie difficile. Pourtant, un jour particulièrement sombre, le destin va lui sourire. Ému par leur situation, un homme les invite dans sa maison du bord de mer, en Bretagne. Tant de générosité après des années de galère : Julie reste méfiante, elle n’a pas l’habitude. Mais pour Lulu, pour voir la mer et faire des châteaux de sable, elle pourrait bien saisir cette main qui se tend…

Juste avant le bonheur – Agnès Ledig

Editeur : Pocket (2014)

Pages : 336

Ma note : 4/5

Giveaway ♥
Je voudrai offrir un exemplaire de « Juste avant le bonheur » d’Agnès Ledig à l’un d’entre vous. Pour cela il suffit de commenter avec cœur ce billet. Je commanderai le livre et le ferai envoyer directement chez le gagnant, parce que mon exemplaire, je le garde précieusement.
Si vous le souhaitez, vous pouvez partager ce post, parce qu’il parlera peut-être à certaines personnes de votre entourage, parce qu’il pourrait faire plaisir à quelqu’un ou à vous, et parce qu’à moi, cela ferait du bien.

Je tirerai au sort parmi les commentaires juste avant de partir à la mer, pas en Bretagne mais plus au sud, du même côté de la France. La Bretagne, je la garde pour une longue semaine, voir deux si je peux. Je tirerai au sort le vendredi 13 mai donc. Sûre que ça portera chance.

Ce jeu est ouvert aux participants de la France métropolitaine.

Vous pouvez aussi vous abonner à la réception des articles de mon blog sur votre mail, sur la droite, il y a un petit encadré pour cela. Promis, les posts ne sont pas toujours aussi longs 😉

Edit du 13/05/16 :
Random a désigné le N°8 gagnant.
Félicitations à Vanessa Manson qui remporte le livre !

Auteur : ducalmelucette

Du calme Lucette est un blog à forte tendance littéraire. Mais pas que !

51 réflexions sur « Juste avant le bonheur (Surprise inside) »

  1. Lire ton post m à donner les larmes aux yeux pourtant je n est jamais connu ce sentiment mais tu le décrit tellement bien que ça en fait des frissons !!!! En étant parent à partir du premier jour jusque je pense à notre dernier souffle la plus grand peur de maman c est de perdre un enfants que serait ma vie sans eux je préfère même pas l imaginer

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    1. Oui biensûr c’est extrêmement difficile, mais le temps nous apaise et comme je l’écris, nous ouvre les portes d’une autre vie. Il ne faut pas l’imaginer, vivre le bonheur présent avec ses enfants, c’est ça le plus important ❤
      J'enregistre ta participation au jeu.

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  2. Puisque tu sais si bien terminer sur une note gaie…. je t attends en Bretagne! je prendrais grand plaisir à discuter avec toi. je vous trouve beaux toi et ton homme… les doudous que vous avez cousu l un et l autre est la preuve que l amour vous unit et que vous méritez le bonheur. Tu as parcouru beaucoup de chemin pour pouvoir écrire un si bel article aujourd’hui. T’es mots aideront et apaiseront à coup sûr. je te souhaite d être heureuse et tout plein de bonheur à tous les 2💖💖💖💖💖

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    1. Cela me ferait très plaisir de te rencontrer, toi et ta petite famille ❤ Dès que nous pouvons visiter la Bretagne, je te dirai !
      Merci beaucoup pour ton message ❤
      Tu souhaites participer au jeu du coup ?

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  3. Bonsoir,
    Ce post est vraiment très touchant, j’en ai les larmes aux yeux. Tu donnes vraiment envie de découvrir cet ouvrage, c’est pourquoi je tente ma petite chance, qui sait!
    De toute manière je pense que j’irai l’acheter sinon, tu m’as vraiment donné très envie de le lire !

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  4. Tu me retournes encore une fois les tripes avec ton article, les larmes me sont montées aux yeux tellement de fois en pensant à ma petite puce. Mais malheureusement elles ne sont pas taries 😦
    Toi Maëlle t’as fait te décider à la couture, ici j’ai enfin la force de me plonger dans l’écriture, avec des hauts et des bas bien sûr.
    Nos anges font partie de ce que nous sommes devenues et ils sont notre force.
    Je lirais ce livre avec plaisir, et une boîte de kleenex.
    Bisous à toi et bisous volants à nos anges malheureusement si nombreux…
    Amandine

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  5. Bonsoir!
    C’est avec un IMMENSE plaisir que je vais tenter ma chance!
    passionnée de lecture , tu as su trouver les mots justes pour susciter mon intérêt et éveiller mes sens! que d’émotions!!!
    je suis fan fb sous le nom : olivia philippe
    j’ai également relayé :

    merci et croisons les doigts!

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  6. Bonjour,
    Quand j’ai vu la couverture du livre sur votre blog, mon sang n’a fait qu’un tour! Une amie m’avais prêté ce livre il y a quelque temps en m’en disant beaucoup de bien. Et à travers votre article, j’ai retrouvé les chamboulements que j’ai ressenti lors de ma lecture. Et lors de ce passage de l’adieu du petit garçon, entre la tristesse et les pleurs, j’ai même été en colère contre l’écrivaine, j’ai crié « non, elle n’a pas le droit de faire ça à cette mère!!! ». Mais j’ai tout de même fini le livre.
    Je participe évidemment au concours pour ce livre, pouvoir le relire malgré tout ce qu’il génère en moi, même si je n’ai pas vécu la perte d’un enfant, ma première poulette a failli ne pas voir le jour, mais elle s’est quand même accroché, un événement qui laisse aussi beaucoup de traces.
    Je croise les doigts et vous souhaite bonne continuation dans tous vos projets.

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    1. Bonjour,
      La vie peut parfois être difficile et vraiment douloureuse. Et je trouve que c’est important d’aborder ce côté là à travers les livres notamment. Un roman tel que celui-ci permet d’exorciser ses peines, de voir au-delà et de se rendre compte qu’après le Drame, il reste la vie. Et même qu’elle puisse devenir jolie. On recherche le bonheur tout en continuant de porter le sac à dos du deuil, avec de plus en plus de force et de volonté. L’auteur ayant réellement vécu cette douleur puis cette résurrection est à même d’en parler sincèrement, même s’il y a clairement exagération comme je l’expliquais.
      Votre participation est validée, bonne chance et merci !

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  7. Ma babounette quel article poignant et criant de vérité… 💜 je n’ai pas d autres mots 💜
    Je t’embrasse fort avec une douce pensées à nos poussières de fées 💜

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  8. Bonsoir, je participe avec grand plaisir 🙂
    Que dire.. beaucoup d’émotions, de tristesse et d’amour à travers vos mots, je ne peux imaginé votre douleur et votre peine. Votre petit ange veilleras toujours sur vous et dans votre coeur. Je ne peux que vous souhaitez encore pleins de courages et de forces, pour elle ❤
    Je serais ravie de découvrir ce livre.
    Merci beaucoup pour ce joli concours, bonne soirée 🙂

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  9. Ton article ma mise les larmes au yeux, il ma chamboule ma touche en pleins coeur. Perdre un enfants et la chose la plus terrible qui existe. Je n’ai jamais vécu sa n’étant pas maman mais mon meilleur ami de l’époque q perdu son petit frère du choque du nourrisson je le tenais dans mes bras laveil encore mon Coeur a étais brise par l’injustice des choses c’est le pire enterement sue j’ai vécu…. Courage q toute les familles ❤ je tente ma chance pour ce jolie ouvrage

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  10. Un très beau billet. Merci! Je retrouve beaucoup de choses dans tes mots. Notamment la force. Pour moi il y a aussi un sentiment d’équilibre, il est comme le pivot de notre famille… Je participe avec plaisir et je lirai ce roman même si je ne le gagne pas!

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  11. Bonjour, très joli article , cela m’a donné envie de découvrir ce livre ! Merci à vous .

    J’ai également partagé sur FB :

    Bon dimanche à vous !

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  12. Je l’ai lu, pinaise que j’ai pleuré
    (mais pas autant que pour marie d’en haut, magnifique celui là aussi)
    pas de participation pour moi, il est dans ma bibliothèque 😉

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